jeudi 10 décembre 2009

INCROYABLE !


Au 8°petit bureau de police sur la route d'Amedabad.

Il nous est arrivé aujourd’hui, 9 décembre, quelque chose d’extraordinaire :
A midi, nous quittons Bombay en voiture taxi, pour le Gujarat. Nous expliquons au chauffeur que nous voulons sur la route repérer certains lieux où Jean-Baptiste aurait pu passer.
On nous a notamment parlé de précipices à Kurar Village, après Gorégaon, et avant Bolivari, jusqu’où nous étions allés dimanche dernier, en train et rickshaw.
Le village…est en fait un quartier en pleine concentration urbaine et nous ne repérons absolument aucun précipice, nous ne sommes pas dans la nature, comme nous l’imaginions.
Nous demandons alors à notre chauffeur de s’arrêter dans chaque petit bureau de police sur notre route. Nous en visiterons 8. Un seul dit avoir reçu de la police de Bombay un avis de recherche, exhibé fièrement d’un tiroir. Ce qui nous laisse penser que les autres les ont sans doute reçus, mais n’en ont peut-être pas fait cas.
Au 7° bureau, on nous dit avoir vu la bicyclette, la veille, les roues en l’air, parce qu’en pleine réparation. Notre chauffeur est assez excité. Je demande de donner l’information sur les téléphones de l’affiche.
Au 8° bureau, 7 policiers désœuvrés nous accueillent quasi chaleureusement. Nous sommes la distraction de l’après-midi. L’un d'eux dit l’avoir vu il y a 2 jours. Nous restons bien sûr toujours assez indifférents. Pas notre chauffeur.
Puis tout s’emballe. Très consciencieux, le chauffeur s’arrête fréquemment et montre la photo de Jean-Baptiste sur son vélo : et là, on lui dit : oui, oui, il est passé il y a 10 mn. Vite , vite. La nuit commence à tomber, il est 18h15. Le chauffeur s’obstine, et je me dis qu’avec la nuit, on ne repérera jamais un cycliste qui a d’ailleurs pu quitter la route. Nouvel arrêt : oui, là-bas, dépêchez- vous. Je commence à croire qu’il se passe quelque chose. Pierre me dit : tu ne vas quand même pas y croire ! à un cycliste, si. Ils ont manifestement tous vu un cyclotouriste qu’ils prennent pour Jean-Baptiste.
Et là, le miracle, dans la nuit qui est maintenant tombée et dans la circulation toujours dense, un point lumineux vacillant : c’est lui ! le chauffeur passe à coté et lui parle, il l’ignore. Nous repassons de l’autre coté et j’ouvre ma fenêtre et lui demande de s’arrêter 5 mn. Il s’arrête, nous aussi. On saute de la voiture et là, c’est extraordinaire : un cyclotouriste, un vrai, devant nous, sur la route qu’à pu emprunter Jean-Baptiste il y a 2 ans. En 5 mois de pérégrinations en Inde, je n’en ai jamais vu un seul. Je crois rêver. Nous sommes très émus. Première pensée : alors c’est possible, on peut vraiment rouler à vélo avec son barda dans la nuit sur des routes de pleine circulation, quasiment une autoroute. Le chauffeur, très excité, me dit : c’est lui, c’est lui ? "Non". Mais il lui ressemble ? Oui bien sûr, il lui ressemble : un européen dans la nuit pédalant d’arrache pied sur son vélo chargé. ..
Il est belge, il a une bonne tête très sympathique, légèrement plus âgé que Jean-Baptiste, couvert de transpiration, et on découvre avec plaisir qu’il parle français, avec un bel accent. On lui montre les avis de recherche, on lui explique en 2 mots. Il est tout désolé.
Mais là où ça devient extraordinaire : c’est qu’il explique être parti en avril de la Belgique, être passé par la France, l’Italie, la Croatie, la Grèce, la Turquie, l’Iran, (on cite les pays en même temps que lui), qu’il n’a pas obtenu son visa pour le Pakistan, alors qu’il a dû prendre l’avion depuis le Moyen Orient (pas Dubaï), et qu’il est arrivé il y a quelques jours à Bombay. Pierre ne cesse de dire : comme Jean-Baptiste, comme Jean-Baptiste...
Je le bombarde de questions, le pauvre. J’ai l’impression de demander à Jean-Baptiste : mais tu as dû démonter ton vélo ? et où as-tu dormi ? Tu es descendu au Sud de Bombay ? et ce soir où vas-tu dormir ?
- Oh, sûrement par là, je vais quitter la grande route et planter ma tente, ou trouver une auberge.
- Mais quand vous plantez la tente, il n’y a pas un attroupement autour de vous ? En fait, je n’en ai pas encore l’expérience en Inde, je viens d’arriver.
C’est courageux ou inconscient, de trouver un endroit où se poser quand la nuit est tombée. Pour ne pas le retarder indéfiniment, nous prenons congé en nous retenant de le prendre dans nos bras, et en lui demandant d’être prudent. Nous sommes vraiment très émus. A peine installée dans la voiture, j’en ressors aussitôt, mue par un pressentiment. Il stoppe aussitôt son premier coup de pédale, sourire aux lèvres :
Quel jour avez-vous atterri à Bombay ? La réponse me cloue sur place : Le 4 décembre ! J’en suis toute retournée ! Lui aussi quand je lui dis que Jean-Baptiste est aussi arrivé le 4 décembre…2007.
Je le laisse aller, et dans la voiture, alors que les kms défilent, voilà que mes pensées restent en arrière, à coté d’un jeune cyclotouriste pédalant dans la nuit noire au milieu du traffic, , et je me mets à m’inquiéter sérieusement pour lui.
Et je ne lui ai même pas demandé son nom ! Oh, si nous l’avions rencontré en plein jour, nous serions allés manger quelque chose ensemble, nous aurions voulu savoir tellement de choses. Nous aurions eu du temps pour échanger. Nous l’aurions pris en photo…etc…
Si seulement nous le rencontrions plus tard. Mais nous en avons fait des kms ! c’est à minuit seulement que nous trouvons un hôtel décent. Et il est 2h du matin et je ne peux pas dormir, j’ai sorti mon ordinateur et avait besoin de partager cette aventure.
Extraordinaire, n’est-ce pas ?
Une des leçons à tirer, et qui confirme ce que je savais déjà : les indiens n’oublient pas un cyclotouriste quand ils en voient un, ils sont tellement rares ! Pourquoi personne n’a-t-il repéré Jean-Baptiste, qui a au moins passé la journée du 5 décembre 2007 à Bombay ? Il y a presque 2 ans que je me pose cette question.

Jeune cyclotouriste belge, si vous avez la curiosité de passer sur ce blog, puisqu'on vous a laissé un poster, dites-nous votre nom et donnez-nous des nouvelles, s'il vous plait. Et bonne chance.

5 commentaires:

Unknown a dit…

Que d'émotions ! merci de nous les partager. Nous avons la sensation de vous accompagner, et nous vous portons dans notre prière, ainsi que Jean-Baptiste bien sûr.

Anonyme a dit…

http://unepetitebalade.blogspot.com/2009/11/au-revoir-l-iran-bonjour-le-sri-lanka.html#comments


bonjour, j'ai un collègue cyclo, yannick, sur la route, serait-ce lui?

bon courage à vous.

jérôme

Marie-Claire Talleu a dit…

Merci, ce n'est pas lui. Il est belge et roule sans casque, comme JB.

Anonyme a dit…

en fait, en photo c'est moi mais voir sur le blog http://unepetitebalade.blogspot.com, c'est celui de yannick mon collègue belge.
jérôme

Marie-Claire Talleu a dit…

Pas de photo de cycliste sur le blog.
Mais d'après l'itinéraire, il ne pouvait pas être à Bombay le 4 décembre, ça ne peut pas être lui. Dommage. Merci quand même.